L’accord politique ouvre la voie à un « nouvel équilibre » en Belgique

Par France 2 (vidéo)

Charlotte OBERTI (texte)

L’accord conclu mercredi entre Flamands et Wallons, après 535 jours de crise, permettra au pays de se doter d’un gouvernement. Selon Pascal Delwit, politologue, la dégradation récente de la situation économique a hâté la recherche d’une solution.

Détentrice du record mondial de la plus longue crise politique, la Belgique est finalement parvenue, mercredi 30 novembre, à un accord sur la formation d’un gouvernement.

Au terme de négociations entre les communautés flamande (néerlandophone) et wallonne (francophone), le chef des socialistes, Elio di Rupo, s’est vu confier la tâche de diriger une coalition regroupant socialistes, démocrates-chrétiens ainsi que libéraux francophones et flamands. Il devrait être nommé Premier ministre dans les prochains jours et devenir ainsi le premier chef de gouvernement francophone depuis 1974.

L’année et demie qui a suivi la démission du gouvernement d’Yves Leterme en avril 2010, fut pour le moins mouvementée. Une crise de 535 jours marquée par la victoire du parti indépendantiste Nouvelle Alliance flamande (N-VA) aux législatives de juillet 2010, mais surtout par l’incapacité des différentes formations politiques à désigner un gouvernement. En quoi consiste l’accord conclu entre les différents partis politiques et quels espoirs les Belges peuvent-ils fonder sur le futur gouvernement ? Décryptage avec Pascal Delwit, politologue à l’université libre de Bruxelles.

En quoi consiste l’accord sur le programme du futur gouvernement ?

Le compromis scellé mercredi 29 novembre entre les six partis politiques, engagés depuis août dans des négociations, comprend trois grands volets. D’abord, un volet classique sur les questions de société, de justice et d’immigration. Un second volet s’attache à l’aspect budgétaire et socio-économique du pays, d’autant plus important que l’année à venir s’annonce compliquée avec 11,3 milliards d’euros d’économies prévus pour le budget 2012. Enfin, un volet de politique intérieure, avec notamment la réforme de l’État. Concrètement, la Belgique tend vers un nouvel équilibre en se dotant d’un État fédéral aux compétences plus modestes et d’entités fédérées (composées des régions et des communautés) aux rôles plus importants.

En outre, l’un des principaux points de contentieux entre Flamands et francophones a été abordé. L’arrondissement bilingue français-néerlandais de « Bruxelles-Hal-Vilvorde » ( » BHV »), au cœur de la discorde entre les deux communautés sur les droits linguistiques, sera dorénavant scindé en deux districts électoraux : la fédération de Bruxelles et le Brabant flamand.

L’influent parti indépendantiste flamand N-VA ne participera pas à la coalition dirigée par Elio di Rupo. Mauvais présage pour le futur gouvernement ?

La N-VA a elle-même décidé de ne pas rentrer dans les négociations. C’est un choix dommageable car cela aurait été plus logique que les deux grands vainqueurs électoraux parviennent à un compromis, et cette absence risque de conférer un aspect fragile au gouvernement. Toutefois, certains partis flamands seront présents dans la coalition. Par la suite, il reviendra aux électeurs belges de juger si un parti qui n’a pas mis à profit sa victoire électorale (lors des législatives de juillet 2010, NDLR) mérite encore leur confiance.

Comment expliquer une si longue période sans gouvernement ?

Outre les désaccords bien connus entre Flamands et francophones, l’absence de gouvernement a pu être supportée grâce à une bonne conjoncture économique. Cependant, ces quatre derniers mois, le climat économique s’est détérioré à la fois dans la zone euro et en Belgique. Les indicateurs de croissance ont été révisés (0,8 % pour 2012). À cela, s’est ajouté un mauvais contexte social, illustré notamment par l’annonce du groupe ArcelorMittal de la fermeture de la sidérurgie à Liège. Cette atmosphère morose et la dégradation de la note belge par l’agence de notation Standard & Poors (passant de la note AA+ à AA), ont probablement incité les partis politiques à clôturer les discussions.

Êtes-vous optimise en ce qui concerne l’avenir politique de la Belgique ?

De nombreux écueils attendent le futur gouvernement. Le contexte belge tendu, l’Europe confrontée à une situation économique et financière catastrophique. Mais aussi des défis tels que les élections municipales en octobre 2012, évènement très important pour les partis politiques. Toutefois, dans une certaine mesure, ces difficultés peuvent être surmontées grâce au fait que les partis ont décidé ensemble d’aller de l’avant. Cela me rend confiant. Ils ont tous intérêt à ce que ce gouvernement fasse du bon travail et aille au terme de la législature.