La Hongrie sommée de modifier rapidement ses lois controversées

Bruxelles a donné mardi un mois au gouvernement hongrois de Viktor Orban pour modifier des lois qui lui confèrent des pouvoirs controversés sur la banque centrale notamment, sous peine d’être poursuivi en justice et de ne pas obtenir une aide financière cruciale.

Le président de la Commission européenne José Manuel Barroso a annoncé à Strasbourg l’ouverture de trois « procédures d’infraction » à l’encontre de la Hongrie au sujet de ses réformes concernant la banque centrale, les juges, et l’autorité hongroise de protection des données.

« Nous ne voulons pas que l’ombre d’un doute soit jetée plus longtemps sur le respect de la démocratie dans ce pays », a expliqué José Manuel Barroso.

S’il ne modifie pas ces textes d’ici un mois, le gouvernement hongrois peut être poursuivi devant la Cour de justice européenne.

Budapest est sous pression également du Fonds monétaire international (FMI), qui s’inquiète de l’indépendance du président de la banque centrale, que la réforme prévoit de flanquer d’adjoints nommés par le gouvernement.

Alors que l’Etat hongrois, au bord de la banqueroute, cherche à obtenir de l’UE et du FMI un crédit de 15 à 20 milliards d’euros, le commissaire en charge des questions économiques Olli Rehn a souligné mardi que la « pleine indépendance de la banque centrale » était une condition à son octroi.

Budapest envoie du coup des signaux apaisants. Mardi, un ministre hongrois, Zoltan Kovacs, a assuré que son pays était prêt à « régler » tous les problèmes soulevés par la Commission, se réjouissant au passage que la discussion soit retombée au niveau « des détails techniques et des questions juridiques ».

Avant de rencontrer M. Barroso le 24 janvier, Viktor Orban viendra s’expliquer en personne mercredi devant le Parlement européen. « Nous ne permettrons pas à la gauche internationale d’accuser la Hongrie sur la scène internationale, avec des mensonges et calomnies infondées », a affirmé à Budapest son porte-parole.

Le débat promet d’être mouvementé, de nombreux eurodéputés dénonçant, comme du reste des dizaines de milliers de citoyens hongrois récemment descendus dans la rue, une dérive autocratique et nationaliste de Viktor Orban, pourtant lui-même une figure de la lutte anticommuniste au début des années 1990.

En avançant l’âge de départ à la retraite des juges, « il est évident qu’Orban cherche à provoquer une vague de départs dans la magistrature » pour y placer des proches de son parti, le Fidesz, juge l’eurodéputée écologiste Hélène Flautre.

Le problème est que face à cela, la Commission adopte « une approche strictement juridique » en n’y voyant qu’une possible « discrimination en fonction de l’âge », déplore-t-elle.

Cette même approche avait permis l’an dernier à la Commission d’obtenir une modification limitée de la loi sur les médias, sans empêcher le gouvernement de retirer sa licence à la seule radio d’opposition du pays, Klubradio.

Certains pays, comme ceux du Benelux, plaident pour que la Commission rédige un rapport plus politique sur la situation en Hongrie.

« Nous surveillons depuis longtemps et de manière systématique le respect des critères budgétaires du traité de Maastricht par les pays européens, je ne vois pas pourquoi nous ne ferions pas la même chose sur le plan politique et le respect des critères de Copenhague » qui concernent le respect de l’Etat de droit, de la démocratie et de la protection des minorités, a dit mardi le ministre belge des Affaires étrangères, Didier Reynders.

En parallèle aux trois procédures lancées mardi, Bruxelles a également annoncé mardi un examen plus approfondi sur l’indépendance de la justice, qui pourrait lui aussi déboucher à terme sur une quatrième procédure d’infraction.

Au Parlement, Libéraux, socialistes et Verts menacent de mettre la Hongrie au ban de l’Europe en lançant à son encontre une procédure qui permet de suspendre un Etat de ses droits de vote en cas de « violation grave » des valeurs de l’UE.

Mais, selon une source proche de la Commission, « la situation n’est pas mûre » pour enclencher une telle procédure très lourde.