Sommet UE: Donald Tusk reconduit malgré l’opposition de Varsovie

 

Donald Tusk, réélu président du conseil européen, le 9 mars 2017, à Bruxelles

 

AFP, i 09 mars 2017

UE: Donald Tusk réélu président du Conseil européen,malgré l’opposition farouche de son pays la Pologne

Les dirigeants européens ont reconduit jeudi le Polonais Donald Tusk pour un second mandat à la présidence du Conseil européen, malgré l’opposition farouche de son propre pays, au cours d’un sommet censé forger l’unité de l’UE post-Brexit.

« Je ferai de mon mieux pour rendre l’UE meilleure », a réagi l’intéressé sur le réseau social Twitter, après un vote des dirigeants européens.

  1. Tusk a été élu à « 27 voix contre une », a indiqué une source diplomatique, confirmant le large soutien que lui avaient témoigné les dirigeants nationaux, Paris et Berlin en tête.

Tusk
Sa reconduction sera « un signe de stabilité pour l’ensemble de l’UE », avait fait valoir la chancelière allemande Angela Merkel.

« Rien (ne doit être fait) sans nous et sans notre accord », avait au contraire insisté la Première ministre polonaise Beata Szydlo à son arrivée à Bruxelles, réitérant sa détermination à refuser la reconduction à la tête du Conseil de l’ancien chef du gouvernement polonais.

« Les pays qui ne comprennent pas cela conduisent à la déstabilisation », a-t-elle accusé, assurant vouloir de son côté « l’unité de l’Europe », grand thème des débats que les dirigeants européens ont prévu d’avoir vendredi, sans le Royaume-Uni.

Un membre de son gouvernement a plus tôt laissé entendre que la Pologne pourrait ne pas signer les conclusions du sommet réuni à Bruxelles, normalement adoptées à l’unanimité des 28, en cas de reconduction de M. Tusk.

Selon une source européenne, ce blocage empêcherait ces conclusions d’être adoptées jeudi soir – elles doivent porter notamment sur des questions économiques et migratoires -, mais cela ne changerait rien à la réélection de M. Tusk, un acte séparé décidé à une majorité qualifiée des pays membres.

Il suffisait en effet de réunir 21 pays favorables au moins (représentant 65% de la population de l’UE) pour qu’il soit réélu à la présidence du Conseil européen.

L’ancien Premier ministre libéral polonais occupe depuis fin 2014 ce poste-clé, dont le rôle est de coordonner les sommets réguliers réunissant les chefs d’Etat ou de gouvernement pour fixer les priorités politiques de l’UE.

– ‘Impartial et neutre’ –

Mme Szydlo lui reproche d’avoir abusé de ses fonctions en ayant « brutalement violé » la règle de « neutralité politique », dans une lettre adressée mercredi à ses homologues européens.

Elle l’accuse de s’être « personnellement impliqué » dans la vie politique de son pays, où certaines réformes réalisées par le pouvoir, aux mains désormais du parti conservateur nationaliste Droit et Justice (PiS), ont été qualifiées par Bruxelles d’atteintes à l’Etat de droit.

« Je suis impartial et politiquement neutre », s’était défendu mercredi M. Tusk, se disant « prêt pour le jugement ».

Le chef du PiS, Jaroslaw Kaczynski, lui impute aussi une « responsabilité morale » pour la catastrophe aérienne de 2010 dans laquelle son frère jumeau, le président Lech Kaczynski, est mort en même temps que de nombreux autres hauts responsables polonais.

Un diplomate d’un pays européen a déploré la volonté d' »exporter un problème intérieur » du gouvernement polonais.

– ‘Plusieurs vitesses’ –

Après le dossier Tusk, les 28 ont prévu d’évoquer jeudi la politique commerciale de l’UE, la crise migratoire et leurs chantiers en matière de défense. Ils doivent également discuter des Balkans occidentaux, où ils s’inquiètent de la montée des tensions et de la dégradation de la situation politique.

Vendredi, sans la Première ministre britannique Theresa May, ils consacreront une matinée à la préparation de la « Déclaration de Rome », qu’ils prévoient de publier pour les 60 ans du traité fondateur de la Communauté – devenue l’Union – européenne, qui seront célébrés à Rome le 25 mars.

Ce texte solennel doit montrer que l’UE restera unie après le Brexit. Mais c’est l’idée d’un avenir à « plusieurs vitesses » pour l’Europe qui cristallise les débats: elle est fortement soutenue par la France et l’Allemagne, désireuses notamment de pouvoir renforcer la défense européenne sans être bloquées par des pays récalcitrants.

D’autres pays s’inquiètent cependant de devenir des membres de deuxième zone de l’Union, comme ceux du groupe de Visegrad (Pologne, Hongrie, République tchèque et Slovaquie), qui se sont notamment illustrés ces derniers mois par leur vive hostilité à la politique migratoire de l’UE.