Tsipras dans l’arène politique grecque pour faire adopter l’accord de Bruxelles

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AFP 14-07-2015

Après avoir éloigné le spectre d’un « Grexit », Alexis Tsipras tentait mardi de rallier son propre camp aux mesures impopulaires exigées par les créanciers, qu’il devra faire adopter par le Parlement au plus tard mercredi.

A peine rentré de Bruxelles, le Premier ministre grec était confronté à une fronde ouverte au sein de son parti, la formation de gauche radicale Syriza.

Pour certains de ses représentants, l’accord arraché au terme d’une nuit de négociations constitue une trahison de la volonté populaire exprimée dans les urnes le 5 juillet, quand 61% des Grecs ont dit « non » à l’austérité.

« Cet accord va passer avec les voix de l’opposition, pas avec celles du peuple », a prévenu le ministre de l’Energie Panagiotis Lafazanis.

Ce dernier avait déjà rompu la solidarité gouvernementale samedi en refusant de donner mandat au Premier ministre de négocier à Bruxelles un nouveau programme de réformes.

Face à cette contestation, M. Tsipras, soucieux de présenter un gouvernement en ordre de marche avant le nouveau vote de mercredi, a discuté mardi d’un éventuel remaniement avec plusieurs responsables de la majorité, selon la télévision publique ERT.

Pas question de faiblir: les partenaires de la Grèce lui ont demandé d’adopter avant le 15 juillet une réforme de la TVA et un élargissement de l’assiette fiscale, une refonte du système de retraites ainsi que l’introduction d’une règle d’or budgétaire.

Un taux de 23% sera appliqué à la restauration et aux produits de base, tandis que l’hôtellerie, secteur-clé en Grèce qui vit du tourisme, restera imposée à 13% et les médicaments à 6%.

« Le projet de loi sur les réformes sera déposé aujourd’hui (mardi) », a indiqué à l’AFP une source gouvernementale. Un délai nécessaire pour qu’il puisse être débattu mercredi à l’Assemblée et voté d’ici mercredi minuit.

– aide d’urgence –

A Bruxelles, les ministres des Finances de la zone euro s’efforçaient pour leur part de trouver des financements d’urgence pour la Grèce, le temps qu’un nouveau plan d’aide, le troisième dont elle bénéficierait depuis 2010, soit formellement mis en place.

Jusqu’à six options sont envisagées, a indiqué le ministre finlandais des Finances, Alexander Stubb, sans préciser lesquelles.

fermées La Grèce doit trouver 12 milliards d’euros d’ici la fin août, y compris pour rembourser la Banque centrale européenne et le Fonds monétaire international (FMI). Dans la nuit de lundi à mardi, la Grèce a une nouvelle fois échoué à honorer un paiement au FMI.

L’Etat grec a néanmoins réussi mardi à rembourser 148 millions d’euros à des créanciers privés au Japon. Une goutte d’eau par rapport à une dette grecque de près de 312 milliards d’euros.

Les banques grecques resteront elles fermées au moins jusqu’à mercredi, le temps que la BCE décide d’augmenter ou non leur ligne de crédit d’urgence, bloquée à 89 milliards d’euros.

Le feu vert des députés grecs n’est qu’un préalable. Il faudra ensuite que les parlements de plusieurs autres pays se prononcent, dont une commission du parlement finlandais jeudi et le Bundestag vendredi, avant de voir se concrétiser la promesse faite à la Grèce d’une nouvelle aide comprise 82 et 86 milliards d’euros.

S’exprimant sur l’accord, le président français François Hollande a déclaré qu’à ses yeux, la Grèce n’avait pas été humiliée. « L’humiliation, c’eût été de la chasser de la zone euro », a-t-il dit.

– Grève des fonctionnaires –

Sur le plan intérieur, M. Tsipras doit pouvoir compter sur le soutien des voix des partis de l’opposition, essentiellement le Pasok (sociaux-démocrates), la Nouvelle Démocratie (conservateurs) et Potami (centre-gauche).

Le leader de Potami Stavros Theodorakis a assuré le Premier ministre de son soutien, appelant les hommes politiques grecs à se montrer « responsables ».

« Ces partis adorent les plans de sauvetage, il n’y aucune chance qu’ils ne le votent pas », a ironisé la vice-présidente du Parlement, Despina Haralambidou, membre de Syriza, pour qui l’accord de Bruxelles est « un désastre », « pire que les précédents » programmes en matière sociale.

Quant au partenaire de Syriza dans la coalition gouvernementale, le parti des Grecs Indépendants (ANEL), il laissait mardi planer le doute sur son vote.

Au sein de Syriza, l’aile modérée faisait tout mardi pour éviter une rupture aux conséquences lourdes pour l’avenir du gouvernement.

Lors du comité central du parti mardi matin, son secrétaire Tassos Koronakis s’est engagé à tout faire « pour sauvegarder l’unité », en indiquant qu’il n’était pas favorable pour l’instant à des sanctions contre les récalcitrants.

« Nous sommes arrivés jusqu’ici, malgré nos divergences d’opinion, en restant fidèles à l’idée que nous maintiendrons le pays dans l’euro », a souligné le ministre de l’Economie, Georges Sthatakis, fidèle à sa ligne conciliatrice.

Au-delà de son parti, M. Tsipras devra prendre garde aux réactions de son électorat, en particulier des syndicats.

Il sera confronté mercredi, jour du vote, à un appel à la grève du syndicat des fonctionnaires, le premier depuis son arrivée au pouvoir en début d’année.