Grèce : après l’offensive de charme, l’UE attend des avancées tangibles

AFP 24­03­2015

 

L’offensive de charme du Premier ministre grec Alexis Tsipras auprès de la chancelière allemande

Angela Merkel a réussi à briser la glace entre les deux pays, mais la pression demeure pour

qu’Athènes concrétise rapidement ses engagements vis­à­vis de ses créanciers.

L’accueil en grande pompe à Berlin lundi soir par la première puissance de la zone euro du

dirigeant issu de la gauche radicale Syriza, mouton noir de ce club, intervient après deux mois au

pouvoir du nouveau gouvernement grec, marqué par un bras­de­fer constant avec ses créanciers

européens.

Ces derniers ne cessent de réclamer de nouveaux engagements de réformes concrets par Athènes,

pour débloquer une dernière tranche de prêts vitale pour la survie financière du pays.

Outre son caractère symbolique, le tête­à­tête Merkel­Tsipras a été perçu comme un signe patent

de la détermination de la dirigeante allemande à aider la Grèce. « Il n’y a pas d’autre voie que le

dialogue » malgré « les désaccords et les questions difficiles » à résoudre, a­t­elle affirmé.

Cette rencontre restait inimaginable il y a encore quelques semaines, quand Alexis Tsipras

évoquait au lendemain de sa victoire aux législatives fin janvier « l’obligation historique » de son

pays « à réclamer à Berlin le remboursement d’indemnisations de guerre ».

Mais le ton a soudainement baissé, Alexis Tsipras admettant qu' »il était faux et simpliste d’imputer

seulement aux étrangers les problèmes en Grèce alors qu’il y a des problèmes internes du pays qui

ont contribué à la crise ».

La majorité de la presse grecque saluait mardi le ton de cette rencontre.

« Hier (lundi) M. Tsipras était différent. Il a défendu les arguments grecs sans extrémisme et avec

un sens de l’autocritique », se félicitait le quotidien libéral grec Kathimerini, tout en déplorant que

le gouvernement ait « perdu deux mois avec des artifices médiatiques ».

­ « Satisfaction prudente » ­

Même l’intransigeant président de l’Eurogroupe Jeroen Dijsselbloem a convenu mardi sur la radio

RTL Z « pouvoir dire avec une satisfaction prudente que le processus avance de nouveau ».

« Dès que nous aurons un accord, nous pourrons (…) aider avec des prêts d’urgence, dans les

prochains mois », a­t­il ajouté, concluant : « Heureusement, (les Grecs) peuvent encore se financer

eux­mêmes ».

M. Tsipras a néanmoins prévenu dans une lettre du 15 mars adressée à Mme Merkel que, sans un

déblocage de fonds rapide, « il sera +impossible+ pour Athènes d’assurer le service de la dette dans

les prochaines semaines ».

Sous pression, le gouvernement grec s’est finalement engagé à présenter des réformes détaillées et

chiffrées, avec une liste prête d’ici lundi « au plus tard ».

La ministre adjointe aux Finances Nadia Valavani a évoqué mardi, avec d’abondants détails, une

loi fiscale en préparation pour le deuxième semestre.

Par ailleurs, le gouvernement espère récupérer 1,2 milliard d’euros qu’il aurait reversé indûment,

faute d’avoir été correctement informé par l’ancien gouvernement, au Fonds européen de stabilité

financière (FESF) en février.

Le président du Parlement européen, l’Allemand Martin Schulz, a estimé qu’un accord était

possible « d’ici à la fin de la semaine », dans une interview mardi au quotidien italien La Repubblica.

Les experts de la zone euro (Euroworking group) doivent se réunir mercredi à Bruxelles tandis

qu’un Eurogroupe devrait être convoqué dès que la liste des réformes sera prête, selon une source

de Bruxelles.

Le spectre d’une sortie de la Grèce de l’euro à la suite d’un accident de paiement (Grexident)

semblait ainsi s’éloigner.

« Les conditions d’un accident sont réunies (…) mais je crois qu’une solution sera trouvée pour

l’éviter », a affirmé ainsi à l’AFP Panayiotis Petrakis, professeur d’économie à l’Université

d’Athènes, arguant « du cadre bien établi » de la zone euro pour éviter de tels problèmes.

La Bourse elle­même a regagné des couleurs après l’effondrement des dernières semaines, prenant

3,66% après près de 3% la veille.

En Grèce, où la popularité de Syriza continue de croître, les citoyens se disent « fiers » de l’attitude

du gouvernement.

« Je ne sais pas ce qui va se passer mais les choses ne peuvent pas devenir pire qu’avant », estime

Maria Fragopoulou, une retraitée dont la pension s’est encore amenuisée ces derniers mois.